Le cri du cinéphile le soir au dessus du Web...

mercredi, août 20, 2008

LifeBoat - Hitchcock ...et Tallulah !


Essentiel. Parce que l'influence de "Hitch" sur 98% du cinéma de divertissement (de qualité, mais aussi des déchets, hélas) pour le meilleur comme pour le pire ne se dément jamais...
Revoyez Lifeboat, ce film finalement assez "culte" par son dispositif toujours fascinant de "huis-clos à ciel ouvert" et vous y retrouverez des dizaines d'idées de plans, de scènes, de montage, de caractérisation, de dialogue etc. que vous avez vues et revues dans des films, des séries etc. Spielberg pour ne citer que lui, "pompe" allégrement la grammaire filmique d'Hitchcock, plan après plan (avec un talent fou, bien sûr et en y ajoutant d'autres choses, faut avouer, les compositions chromatiques de Fleming, l'émotion de Curtiz, la caméra très mobile de Walsh etc.) comme le font aussi, forcément, les "néo-Spielberguiens" comme Darabont (The Mist -un quasi-remake de The Birds, au passage...), JJ Abrams (sur la barque de Lifeboat, comme sur l'ïle de Lost, dès que l'intensité dramatique monte en puissance, les éléments se déchainent en même temps que les passions...)... Alors, on dit toujours que c'est DePalma, le plagiaire "attitré" d'Hitchcock, il est vrai que le réalisateur de Dressed To Kill et d'Obsession ne se gène pas pour se servir chez Sir Alfred, mais d'une part, DePalma s'inspire autant -sinon plus- d'Orson Welles, de Peckinpah et de Leone que D'Hitchcock et d'autre part, Spielberg "pompe" autant Hitchcock que lui, voire plus, au point d'être pour moi, bien plus digne d'être son vrai héritier spirituel...
Enchainer les (re)visions de films produit parfois des coincidences, des rapprochements assez inattendus... A peu de temps d'intervalle, j'ai vu Mizoguchi et Hitchcock suggérer tous deux l'évaporation d'une âme par le scintillement du soleil à la surface de l'eau...
Les trouvailles de montage, de mise en scène abondent dans Lifeboat... Difficile de les recenser toutes sans trop déflorer le scénario (et Hitch est sans doute le moins "spoilable" des cinéastes)... Mais, bon, tant pis pour vous, deux exemples: lors de la terrible scène de l'amputation, Hitch suggère toute l'horreur de l'opération et la perte du membre par un plan sur la chaussure posée à l'écart, dont bien sûr le malheureux personnage n'aura plus besoin. Plus tard, autre moment d'anthologie, les rescapés se laissent à leur tour gagner par la barbarie en lynchant le "barbare" nazi qui les a dupés... La scène est entièrement filmée en retrait, en cadrant le dos des personnages qui s'acharnent sur leur victime, submergée par des flots de violence, avant de réellement sombrer dans l'océan. Et lors de cette deuxième scène, la chaussure de l'amputé (mort à cause du nazi que l'on lynche, justement !) réapparait, utilisée par l'un des lyncheurs pour frapper le "monstre". Génial.
Un mot aussi sur la direction d'acteurs. Formidable. L'occasion de découvrir une actrice épatante et méconnue, Tallulah Bankhead, mélange de Bette Davis et Marlène Dietrich, caractère trempé et humour acide, charme irrésistible... Elle avait eu une carrière cinématogaphique assez pauvre (personnalité trop instable...) mais était un monstre sacré sur scène à Broadway... Rien que pour elle et son personnage de journaliste pétillante et sarcastique qui n'aime ni les Nazis, ni les cocos, (re)voyez Lifeboat... Pour vous rendre compte que tout compte fait, les films d'Hitchcock qui ont le moins mal "vieilli" ne sont pas forcément les plus récents, ni les plus connus...

samedi, août 16, 2008

Frère(s) et Soeur(s)..




Deux enfants... Un frère et une soeur... Poursuivis par un danger, un démon, un tueur, un monstre, un ogre... En quête d'un ailleurs, d'un hypothétique refuge... Schéma classique, récit fondateur, archétype... L'Intendant Sansho, La Nuit Du Chasseur (Laughton connaissait-il Mizoguchi ?), Paysage Dans le Brouillard (Angelopoulos, lui, on le sait, s'inspire du génie japonais)... 28 Weeks Later, suite réussie du film de Danny Boyle, 28 Days Later...
Quand le film de zombies revisité est traversé de références aux contes, à la mythologie... Robert Carlisle est un ogre-Saturne qui a sûrement chaussé ses bottes de sept lieues pour pouvoir rattraper (et dévorer) ses enfants aussi vite, et où qu'ils se trouvent... L'ogre d'Angelopoulos, lui, se cache dans un camion, sur une autoroute d'apocalypse... Quant au dernier plan légendaire de l'Intendant Sansho, c'est Eastwood (Flags Of Our Fathers/ Letters from Iwo Jima) et Malick (The Thin Red Line), deux nouveaux Homères qui ont chanté l'Iliade des archipels du Pacifique qui s'en souviennent... Malick, chez qui les "frères et soeurs" ne le sont pas vraiment (Days of Heaven), chez qui les amants en fuite (Badlands - là, c'est le jeune "héros", le démon-tueur, déjà contaminé par "some meanness in this world" chantée par Springsteen dans Nebraska...) ressemblent à un frère et une soeur...
Revoir l'Intendant Sansho... Ca m'a un peu mis la tête à l'envers... D'où la divagation qui précède... J'ai encore devant moi, quand je ferme les yeux, l'éclat du soleil qui miroite à la surface de l'eau, à l'arrière-plan, quand Zushio revient à l'endroit où sa soeur s'est noyée...